Canicule 2003 : des milliers de morts, et un impact à long terme
Août 2003. Jean-François Mattéi, Ministre de la Santé, apparaît au journal télévisé en polo, dans un décor arboré.
Une terrible canicule est en cours, faisant des milliers de morts. Le journaliste demande « avez-vous des chiffres ? ».
Réponse : « j’entends des estimations, 50 par-ci, 300 par-là. Des mesures ont été prises pour comptabiliser les décès qui pouvaient être rapportés à la chaleur. La part des choses est difficile à faire ».
Cette séquence est considérée comme l’une des pires erreurs politiques ayant jamais été commises, montrant un décalage entre des politiciens hors-sol et une population en plein désarroi.Près de 20 000 morts ont été comptabilisés à l’issue de cette canicule de 2003.
Pourtant, peu de temps auparavant, la réglementation des bâtiments neufs commence à se préoccuper du confort d’été, et se concrétise dès la publication de la RT 2000[1].
Un nouvel indicateur, la Température Intérieure Conventionnelle (Tic) est alors créé. Aucun bâtiment construit ne peut plus désormais dépasser une valeur de température de référence.
Cet indicateur, malgré ses limites, est maintenu dans les réglementations thermiques suivantes, la RT 2005 [2]et la RT 2012[3].
L’inquiétude concernant le changement climatique s’amplifiant, l’Etat lance au milieu des années 2010 un nouveau chantier pour que les bâtiments neufs s’adaptent mieux au réchauffement annoncé par le GIEC. Une nouvelle réglementation voit le jour, la RE2020[4], qui intègre un indicateur radicalement nouveau : les degrés-heures. Applicable au 1er janvier 2022, les textes prévoient de faire en sorte que les bâtiments supportent non pas un pic ponctuel de chaleur, mais un nombre global d’heures d’inconfort thermique.
Les degrés-heures en RE2020 : mesurer l’inconfort
Comment mesure-t-on les degrés-heures (DH) ?
D’une part, on mesure chaque heure la température intérieure simulée[5] en fonction des caractéristiques de bâtiment sur la base des températures de la canicule de 2003. Mieux le bâtiment est pensé, plus il va être capable de résister aux fortes températures (murs plus épais, isolation extérieure, vitrages performants…).
D’autre part, on prend en compte une température conventionnelle (26 à 28°C[6] le jour, 26°C la nuit).
Enfin, on fait la différence entre ces deux températures.
Ainsi, avec une température simulée de 30°C entre 12h et 13h, on compte 3 degrés-heures [7](DH). Dans un autre cas, si la température simulée est inférieure ou égale à 27°C, on considère qu’il n’y a pas de surchauffe ; on ne compte donc rien.
Il suffit de cumuler les degrés-heures pendant la saison estivale, et on obtient la valeur des DH [8]pour le bâtiment concerné.
Trois cas possibles :
- Degrés-heures > 1250 : projet non conforme à la RE2020
- Degrés-heures < 350 : projet conforme à la RE2020, le bâtiment est considéré confortable en toutes circonstances
- 350 ≤ Degrés-heures ≤ 1250 : risque d’inconfort d’été. Le calcul RE2020 pénalise le projet forfaitairement en fonction du type de bâtiment, de la zone climatique et des degrés-heures d’inconfort.
[5]Basée sur la norme NF 15251 (confort adaptatif)
[6]Après une succession de journées chaudes, le corps humain supporte mieux la chaleur. La méthode de calcul RE2020 traduit cette adaptation du corps par une élévation du seuil de calcul de 26°C de +0 à +2°C suivant les températures subies. L’élévation de ce seuil est déterminée par les algorithmes de calcul qui retranscrivent la norme NF 15 251 sur le confort adaptatif.
[7] 30-27=3
[8]Nota : l’exemple est simplifié…
En quoi les brasseurs d’air permettent d’améliorer le confort d’été ?
Depuis l’Antiquité, l’action bénéfique des éventails est connue.
Selon le même principe, les brasseurs d’air électriques accélèrent le déplacement de l’air et de ce fait, la perte de chaleur au niveau de la peau.
Nous présenterons dans un prochain article un état de l’artsur le confort thermique ressenti. Précisons que la RE2020 ne tient pas compte de l’humidité ambiante, ni de l’habillement des occupants.
Dès lors, le confort thermique ressenti est basé sur la seule vitesse d’air.
Dans ce domaine, les professionnels font souvent référence au diagramme ci-dessous, extrait du Guide de Ventilation Woods[8].
[8] Ce tableau apparaît ici à titre indicatif.
Figure 1 – Refroidissement ressenti en fonction de la vitesse d’air
Ainsi, plus la vitesse d’air est élevée, plus l’occupant pourra supporter des températures élevées.
Cela amène un calcul des degrés-heures qui va naturellement encourager les solutions de type brasseurs d’air, puits climatiques, etc.
RE2020 : les brasseurs d’air deviennent incontournables
Trois bureaux d’études réputés, Bastide Bondoux, Pouget Consultants et Tribu Energie ont travaillé conjointement et publié une étude en juillet 2021[10] montrant le rôle essentiel des brasseurs d’air pour le confort d’été en RE 2020.
En voici quelques extraits (p.41):
- (En zone H3 – Littoral Méditerranéen), les brasseurs d’air vont devenir la référence pour limiter l’inconfort en été.
- L’action des brasseurs des brasseurs d’airs sur les degrés-heures est toujours très valorisée.
- Les brasseurs apparaissent comme un moyen très simple de réduire drastiquement l’inconfort, même supérieur à l’action du puits climatique en zone H3
En Zone H3/H2D (arc méditerranéen) les brasseurs d’air sont incontournables en confort d’été pour atteindre les exigences de la RE2020.
Zoom sur les brasseurs d’air en Maison individuelle : quelques résultats de simulations
Rappelons tout d’abord que les brasseurs d’air sont une partie de la solution ; ils ne viennent pas se substituer à une bonne conception. Nous dirions même qu’ils viennent davantage couronner une bonne architecture et une bonne ingénierie thermique, plus que de compenser les défauts d’un bâtiment mal pensé !
Les éléments ci-dessous résultent de nos premières simulations en RE2020, et sont plutôt destinés aux concepteurs qu’aux acheteurs de maisons individuelle ; ils sont voués à être précisés dans l’avenir.
- Un usage de jour donne de meilleurs résultats en termes de degrés-heures qu’un usage jour et nuit,
- Des ventilateurs ayant un débit d’air élevé donnent de meilleurs résultats en termes de degrés-heures[10],
- Une plus grande quantité de brasseurs d’air permet d’obtenir un nombre de degrés-heures plus faible (cela va de soi, mais cela va mieux en le disant). Les zones climatiques les plus chaudes amènent à un taux d’équipement plus fort pour tenir les objectifs de degrés-heures. Ainsi, en zone H3 (arc méditerranéen et H2D (basses-Alpes au sens large + Lozère), il semble difficile de respecter les DH en l’absence de brasseurs d’air.
- Une gestion automatique avec thermostat (déclenchement du brasseur d’air en fonction de la température) est très bénéfique. A notre connaissance, il n’existe pas sur le marché d’appareils ainsi équipés, mais cela va probablement apparaître à terme.
Bref, la RE2020 prend en compte l’efficacité des brasseurs d’air dans les calculs (à travers les degrés-heures), ce qui en fait une solution économique et efficace pour atteindre les objectifs réglementaires de confort d’été.
Cet article sera actualisé au fur et à mesure des informations communiquées par nos partenaires ; pensez à nous suivre sur Linkedin pour être tenus au courant des nouveautés !
Respecter la réglementation RE2020 ou obtenir un réel confort : pour vous, quelle est la priorité ?
Posée ainsi, la question peut sembler incongrue.
Dans la pratique, la réglementation environnementale est considérée comme un cadre fixant un minimum à atteindre en termes de qualité énergétique et environnementale.
C’est pourquoi, au-delà du respect de la RE2020, qui est nécessaire, quelques règles de base doivent être appliquées si l’on veut un réel confort thermique estival dans une maison individuelle équipée de brasseurs d’air.
- Chambres: prévoir au minimum un brasseur d’air par pièce de moins de 15 m². Au minimum, prévoir une attente pour les ventilateurs de plafond dans les pièces non équipées.
- Séjour: le nombre de brasseurs d’air va dépendre à la fois de la taille de la pièce, de son orientation, des protections solaires, des vitrages, de l’isolation en toiture. Ainsi, une pièce orientée Ouest, avec de larges vitrages de performance moyenne, peut être sensible à la surchauffe, et nécessiter davantage de ventilateurs plafonniers. Une approche simple pour le séjour peut s’inspirer de la réglementation des DOM, qui prévoit un brasseur par tranche de 20 m² de surface de plancher.
Positionnement : bien disposer les brasseurs d’air au-dessus des zones occupées. En effet, dans le cas de brasseurs d’air à pales par exemple, la zone d’influence est limitée à un cylindre à la verticale des pales (voir figure ci-dessous). Ainsi, un ventilateur de plafond légèrement décalé par rapport à une zone de couchage présenterait peu d’intérêt. On peut noter que les brasseurs d’air sans pales sont moins sensibles à la question du positionnement.
Figure 2 – Répartition de la vitesse d’air avec un ventilateur à pales (Source : Gao et al., 2017)
- Points lumineux: veiller à éviter les effets stroboscopiques, car un brasseur d’air à pales, s’il est placé en-dessous d’un point lumineux, va couper la lumière à intervalles réguliers.
- Hauteur sous pales: comme cela a été exposé dans un article précédent, nous conseillons vivement de respecter la norme NF EN CEI 60335-2-80, qui recommande une hauteur minimale de 2,30 m entre le sol et les pales.
La RE2020 reconnaît l’utilité des brasseurs d’air pour le confort d’été, en faisant même l’un des piliers incontournables du confort d’été.
La prise en compte de bonnes pratiques d’installation permettra aux propriétaires de maisons individuelles d’en profiter au mieux, et de faire face dans les meilleures conditions aux évolutions climatiques qui se dessinent.
Remerciements
Nous tenons à remercier pour leur aide les bureaux d’études et organisations suivantes, qui ont contribué à une meilleure compréhension du sujet.
Bastide-Bondoux, BBS-Slama, Facteur 4, Pouget Consultants, Tribu Energie, le CSTB et le Cerema Méditerranée.